nos éditoriaux : notre édito du 27 juin 2008 : « réalités luxembourgeoises et mondiales sur la dyslexie » notre édito du 04 janvier 2007 : « 2007, une année profitable ? » notre édito du 06 juin 2006 : « le saviez - vous ? »
Force est de constater que :
parmi les besoins éducatifs spéciaux de la population scolaire mondiale [1, 2], la nosographie médicale fait l’observation de troubles dits spécifiques de la lecture ou dyslexie-dysorthographie, à travers les dernières versions des deux codifications médicales internationales que sont l’ICD10 (code F81.0 Trouble spécifique de la lecture) [3] et le DSM IV (troubles spécifiques du langage) [4]
cette dyslexie-dysorthographie affecte durablement et sévèrement les élèves en dépit d’une intelligence normale, d’une instruction appropriée et de l’absence d’entraves neuro-sensorielles ou socio-culturelles, ce dès leur plus jeune âge et indépendamment de toute origine, nationalité ou langue maternelle, provoquant à terme un retard scolaire considérable sans comparaison avec leurs capacités intellectuelles véritables [5, 6, 7]
il est établi que la dyslexie, de par sa nature neurophysiologique et neuroanatomique, entrave gravement le développement linguistique de l’enfant [8, 9, 10] et souvent s’associe à d’autres troubles dits spécifiques de l’apprentissage (co-morbidité), affectant fort logiquement le capital psychoaffectif de l’enfant concerné [11, 12, 13] et générateur de grandes souffrances dans son environnement le plus proche [14]
de nombreux signes avant-coureurs suggèrent clairement et parfois précocement les différentes formes de troubles de l’apprentissage au cœur desquels la dyslexie [10, 13, 15, 16, 17, 18], de concert avec des prédicteurs avérés des différents troubles de l’apprentissage (troubles de la parole, de l’écriture ou les troubles moteurs ou praxiques, …) [19]
les études scientifiques ont permis de faire rendre l’âme à toute une foule de mythes autour de la dyslexie dont notamment le bilinguisme [9, 20] et permettent de distinguer retard simple de langage [8] , échec scolaire [21], Besoins Educatifs Spéciaux [22] , troubles de la lecture et troubles dyslexiques [10, 23]
en termes de prévalence, de nombreuses études scientifiques ont démontré le fort taux des troubles de l’apprentissage de la lecture dans la population générale (approximativement 20%, soit au moins quatre enfants par classe) [23, 24], dont environ un quart imputable à la seule dyslexie (approximativement 5%, soit un enfant sur une classe de vingt élèves) [6, 10, 19, 25, 26, 27, 28]
le monde de l’enseignement convient, devant les différents types de dyslexies spécifiques et au-delà des débats sur les méthodes globales ou syllabiques [29, 30], de l’impuissance de modèles de soutien traditionnels et préconise la mise en place indispensable d’approches pédagogiques et remédiatives multisensorielles intégratives inspirées de l’orthopédagogie [4, 10, 13, 20] d’autant qu’une intervention la plus précoce et la plus intégrative possible dans l’institution scolaire promet une lutte plus efficace contre les troubles de l’apprentissage [31] et plus spécifiquement dans les dyslexies, à travers des outils de repérage, de dépistage, de diagnostic [13, 27] et de soutien [6, 32, 33], alors que les enfants particulièrement intelligents peuvent surmonter un certain temps leur difficultés et celles – ci n’apparaître spontanément que bien plus tardivement, ce qui rend utile un dépistage précoce d’autant plus impératif [10]
devant l’effort déjà produit tous les jours par nos enseignant(e)s et en reconnaissance de la charge de travail supplémentaire incontestable que signifie pour eux l’éducation dispensée aux élèves atteints de troubles de l’apprentissage [12, 34, 35], nous soulignons la nécessité d’un soutien aux enseignants des écoles primaires, confrontés, à l’image de leurs collègues à travers le Luxembourg et au niveau européen [36, 37], à la prise en charge de lourds troubles de l’apprentissage (dyslexie, dysphasie, dyscalculie, dyspraxie, troubles de l’attention, hyper/ hypoactivité, …), par le biais de procédés de repérage, de diagnostic, de rééducation [27], d’auto-audit, de soutien aux élèves, parents d’élèves et enseignants dans un esprit de concertation, d’entre aide et de prévention [38]
actuellement, les inspecteurs scolaires au Grand-Duché sont déjà tenus d’appliquer les dispositions de l’Action 37 du Plan d’Action 2007-2009 du Ministère de l’Education Nationale visant à créer un contingent de professionnels enseignants ultraspécialisés en dyslexie [39], excluant par voie de conséquence de reléguer ces tâches hautement orthopédagogiques à des enseignants non titularisés et rendant donc obsolètes les procédures actuellement en vigueur dans certaines communes encore
dans un avenir très proche, la loi scolaire de 1912 [40] est vouée à céder le pas à une nouvelle mouture visant la reconnaissance expresse et la prise en charge transversale des besoins éducatifs spéciaux au nombre desquels la dyslexie (à l’instar de nombreux pays européens) [6]; de manière plus générale, la nouvelle loi scolaire définira l’application dans nos écoles primaires de socles de compétence notamment dans le domaine des langues [41, 42]
dans ce contexte, nous ne manquons pas de noter que le système scolaire luxembourgeois promeut à l’école primaire la pratique orale et écrite de langues étrangères plus ou moins irrégulières (opaques) sur le plan linguistique des relations phonémo-graphémiques [43, 44, 45] et par conséquent tout particulièrement propices au développement de troubles de l’apprentissage de nature dyslexique, d’autant que les élèves luxembourgeois débutent le français plus tardivement qu’en France, ce qui retarde d’autant l’apparition de la discrépance entre capacités intellectuelles et les performances en lecture/écriture
la population scolaire migrante souffre d’un éclatement linguistique et socioculturel sensible, mélangeant polyglossie, xénophonie [42] et négligence de l’enseignement de la langue maternelle originale [46], confinant les enfants de migrants dans des ghettos semi-linguistiques propices à teinter davantage encore les performances scolaires des migrants dyslexiques [47]
depuis les années 80, les agences internationales et plus particulièrement le monde politique prend progressivement conscience de la problématique de la dyslexie et plus largement des troubles de l’apprentissage [48, 49]
parallèlement aux prises de position des ligues luxembourgeoises pour les droits de l’homme et de l’enfant [50, 51], nos propres politiciens luxembourgeois commencent à développer le sujet en préconisant la reconnaissance de la dyslexie et en soulignant l’urgence d’une prise en charge multidisciplinaire des différents types de troubles de l’apprentissage [52, 53, 54, 55, 56]
nous constatons que dans les communes voisines de Pétange [57] et de Differdange [58] respectivement dans les communes de Sanem [59], de Mondercange [60] de Bettembourg [61] de Luxembourg-Ville [62], les politiciens de tous bords se félicitent hautement de l’existence, depuis plusieurs années, d’un soutien spécifique aux enfants porteurs de troubles dits spécifiques de l’apprentissage à travers un projet avisé par le Ministère de l’Education Nationale, projet portant dans les communes de Pétange et de Differdange le nom officiel de « projet dyslexie » [annexe 1], s’articulant autour de leur collaboration étroite avec les Services de Guidance (SUD1) [63] et Services rééducatifs et ambulatoires (SREA) [64] attachés, agences appartenant toutes au service de l’Education Différenciée du Ministère de l’Education Nationale [65, 66]
nous nous réjouissons de la volonté affichée par le projet « dyslexie » de favoriser l’inclusion des élèves, telle que soulignée par l’éthique [50, 67] et les techniques les plus récentes de la pédagogie [68, 69]
nous insistons sur le fait que le projet a déjà été soumis à des audits réguliers et rencontre l’enthousiasme du Ministère de l’Education Nationale, de l’Education Différenciée et du corps pédagogique des communes citées puisque apportant une plus value réelle pédagogique [42, annexe 2]
nous signalons l’affectation dès septembre 2008 de deux postes pleins d’instituteurs d’enseignement spécial à la population scolaire primaire de la commune de Pétange (approximativement 1200 enfants), voire de quatre postes à Differdange et de quatre postes à Sanem (1600 enfants scolarisés en primaire), tous avec l’obligation d’être en possession de la licence de Legasthenietrainer [70] autrichienne ou allemande ; à ce titre, nous rappelons qu’à prévalence égale de dyslexie, aucun enseignement spécial n’est assuré à l’école primaire dans certaines communes dans le sens de l’Action 37 du Plan d’Action 2007-2009 [39] et qu’aucun bilan systématique des troubles des acquisitions scolaires n’est entrepris
nous insistons sur le fait que les postes d’instituteur d’éducation différenciée sont financés par le Ministère d’Education Nationale jusqu’à concurrence de 80%, le solde demeurant à charge du budget communal.
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A quand enfin une reconnaissance des troubles de l'apprentissage : car soyons lucides. Le problème évoqué par notre association n'est ni isolé, ni mineur, ni ne manque - t -il de fondement scientifique ou de réalité sociale. Le Grand- Duché de Luxembourg n'est pas davantage épargné par les troubles de l'apprentissage que ne le sont les autres pays de la Communauté Européenne ou encore le restant du globe : seulement, cette problématique n'est qu'insuffisamment traitée par les acteurs en charge de ce dossier, ce qui se traduit par une carence de son dépistage, de diagnostic, et partant, de traitement ou du moins de prise en charge institutionnelle. Pallier au déficit du débat au sein du champ public correspond à l'une des missions que notre association s'est fixée afin d'amorcer le débat, sans aucune polémique. Pour ma part, j'ai été rendu attentif à la complexité du champ des troubles de l'apprentissage par mon expérience professionnelle de médecin de famille et de médecin scolaire tel qu'il est confronté à des parents et des enfants et adolescents victimes des questions relatives à la dyslexie, la dyscalculie, l'hyperactivité et la surdouance. Je puis donc affirmer en tant qu'acteur militant de la santé publique qu'il nous importe clairement d'intervenir afin que cette situation éthiquement déplorable et socialement hautement nocive ne se pérennise davantage encore. Les dernières polémiques confirment ce sentiment de malaise au sein de la société luxembourgeoise et donnent à penser que les agences institutionnelles sont appelées à s'interroger sur le rôle qu'elles comptent remplir à l'avenir autant à l'endroit de la population scolaire générale que de celle plus fragilisée par un trouble de l'apprentissage ou tout autre handicap. Car nous ne songeons nullement à opposer élèves handicapés et enfants souffrant des troubles de l'apprentissage : ces derniers représentent tout autant un handicap que les autres. Au demeurant, ils se mélangent bien souvent pour ne plus constituer qu'une trame inextricable de soucis engluant tout effort de solution. Aussi appartient - il à notre société en entier de trouver des solutions de rechange à cette misère véritablement à dimension sociale, puisque handicapante en termes d'image dévalorisante pour la personne concernée, d'atteinte de sa propre reconnaissance sociale, de contrariété définitive de ses chances de réussite professionnelle et en définitive d'épanouissement de sa condition humaine et de sa contribution au champ social et civique. Le sujet est vaste et les obstacles semblent insurmontables. Aussi sans attendre, attelons - nous à cette noble oeuvre ... Avis aux amateurs.
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Le Grand - Duché de Luxembourg a beau figurer parmi les pays les plus riches de notre monde actuel en termes de PIB par tête d'habitant. Il n'en demeure pas moins que sa société est minée pour ne pas dire gangrenée par un profond malaise de ses habitants, de quelque nationalité qu'ils fussent. En effet, à la différence de notre amie la Finlande que nous associons à un modèle équivalent de réussite économique, notre nation ne figure qu'en bonne avant-dernière des pays évalués par l'étude PISA de l'OCDE. Et nous ne parlons là que de la classe scolaire dans son ensemble, c'est à dire que nous ne distinguons pas entre enfants souffrant peu ou prou de troubles quelconques d'apprentissage. Est - ce à dire que nos citoyens seraient médiocres, pour rester polis ? Que nini, de toute évidence. Or, notre bon sens - car nous n'en sommes pas dénués même si nous représentons l'ultime cancre de la Communauté Européenne - nous permet de raisonner que si nos enfants ne sont pas plus ou moins intelligents que les autres, la faute revient forcément à la qualité intrinsèque de notre système éducatif tout entier. Et ce malgré la part importante du PIB que notre société consacre aux dépenses liées à l'éducation scolaire et à la formation professionnelle, malgré les efforts que déploie avec abnégation notre corps enseignant et le souci constants de nos parents d'élèves d'aider leur enfants à gagner leurs lauriers. Lorsque vous êtes Luxembourgeois et que vous vous adressez à l'étranger à un large public ou à des experts avertis, vous saurez à quel point vos correspondants seront ébahis d'apprendre ce genre de constat amer et pourtant vrai. Pourtant, point n'est l'heure de baisser les bras. Il est de notre responsabilité citoyenne et politique au sens noble du terme de prendre le prendre le problème à bras - le - corps et de nous soucier de remédier à cette misère éducative. Il ne nous appartient pas de porter des jugements sur les les différents acteurs de notre système éducatif. Nous ne nous posons pas en apôtres moralisateurs. Bien des enfants parmi nos propres membres, bien même des membres adultes parmi notre association sont concernés par cette matière pour qu'ils consentent à se résoudre à s'abandonner à un misérabilisme. Nous ne recherchons par la commisération ou une reconnaissance de façade. Nous sommes davantage soucieux de promouvoir le débat public et d'être porteur d'un message d'espoir et de susciter, puis véhiculer un début de réponse à ce champ de la société qu'est le développement et l'épanouissement de notre vivier intellectuel et artisanal. Car ne disposant pas de ressources premières depuis la fin de notre activité minière, il s'agit en toute logique de faire fructifier la seule richesse que nous possédions réellement, à savoir ce métissage entre histoire mouvementée, vision européenne, société polyglotte et multiculturelle. Ce n'est qu'à ce titre que nous saurons toujours encore nous porter à l'avant des innovations technologiques et culturelles sans pour autant exclure une part croissante de notre société. Cette mise à l'écart, cette ségrégation coûte terriblement cher, financièrement parlant certes, et cela n'esp point négligeable, mais bien plus encore humainement parlant. Alors, sus aux problèmes, tous ensemble, car il n'y a pas d'avenir sans épines. La solidarité entre citoyens et acteurs du monde éducatif, c'est aussi cela.
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